Emmaüs Europe

Emmaüs au Royaume-Uni

D’après un entretien avec Sue Taylor, présidente d’Emmaüs UK et déléguée nationale du Royaume-Uni au Conseil régional d’Emmaüs Europe.

Peux-tu nous raconter les débuts d’Emmaüs au Royaume-Uni ?

À la fin des années 80, à Cambridge, des bénévoles distribuaient de la soupe dans la rue aux sans-abris lorsque l’un d’eux a crié : « Nous n’avons pas besoin de nourriture, nous avons besoin de travail ». Un des bénévoles, Selwyn Image, se souvient alors des années 60 et de son séjour de plusieurs mois en tant que bénévole à la communauté Emmaüs de Neuilly-Plaisance en France. Il prend contact avec Emmaüs International et lance la première communauté de chiffonniers à Cambridge en 1991.

Aujourd’hui, la plupart des communautés offrent entre 20 et 40 places pour vivre. Il n’y a pas deux communautés Emmaüs identiques : chacune a sa propre personnalité, fournissant un ensemble de services qui répondent aux besoins locaux. Chacune a au moins un magasin ou une entreprise sociale, mais il y a aussi de nombreux cafés, épiceries, projets agricoles et entreprises d’enlèvement de meubles. Ensemble, les compagnons travaillent à surmonter le sans-abrisme et l’exclusion sociale tout en utilisant la voix d’Emmaüs pour réaliser le changement social.

Au Royaume-Uni, Emmaüs représente une manière différente de lutter contre le sans-abrisme, peux-tu nous en dire plus ?

Souvent, le point de vue que les gens ont de quelqu’un sans-abri au Royaume-Uni est celui d’une personne qui dort devant une porte de magasin ou sur un banc de parc, mais il y a aussi un grand nombre de personnes qui sont contraints d’habiter chez des amis ou de dormir sur un canapé différent chaque nuit. C’est le côté du sans-abrisme au Royaume-Uni que nous ne voyons peut-être pas, mais il peut avoir un impact tout aussi dévastateur sur la vie des personnes qui le traversent.

Une grande partie de l’hébergement social disponible ne peut fournir qu’un lit pour la nuit et un repas chaud, mais le lendemain matin, ils sont de nouveau dans la rue. Cela ne donne pas nécessairement à l’individu la possibilité de s’attaquer à la cause profonde de son sans-abrisme et de trouver un moyen à long terme de le surmonter.

C’est là qu’Emmaüs au Royaume-Uni est différent des autres prestataires sociaux avec notre modèle unique offrant une maison ainsi qu’un travail significatif dans nos entreprises sociales. Cette opportunité, de faire partie d’une communauté et d’y contribuer, joue un rôle important dans le rétablissement de l’estime de soi et aide les compagnons à trouver un moyen de surmonter le sans-abrisme à long terme. Nos entreprises sociales font partie intégrante de la vie communautaire et nous aident à générer les revenus qui, à terme, rendront chacune de nos communautés autosuffisantes, ce vers quoi tend chaque communauté. Mais pour le moment notre activité est également soutenue par nos autorités locales qui financent pour nos compagnons les frais de logement alors qu’ils vivent au sein des communautés et par des donateurs privés. Notre organisation nationale est un support essentiel pour la collecte de fonds et la communication.

Quelles sont les principales activités économiques d’Emmaüs au Royaume-Uni ?

La principale activité commerciale des communautés Emmaüs est la collecte de meubles et d’articles ménagers donnés et leur vente dans nos magasins. Certains articles sont remis à neuf ou, dans le cas d’articles électriques, testés pour la sécurité. Nos études montrent que 79% des compagnons qui vivent à Emmaüs depuis quelques mois disent que travailler et avoir quelque chose à faire tous les jours a été la partie la plus bénéfique de leur expérience.

L’épine dorsale de l’entreprise sociale Emmaüs au Royaume-Uni est la vente de meubles d’occasion, mais nous exploitons également des cafés, des entreprises de nettoyage, des projets agricoles et des magasins de vêtements. Les communautés et les groupes gèrent également des services de collecte d’encombrants ou fournissent des contrats de soutien aux collectivités locales. De nombreuses communautés Emmaüs «up-cyclent» également les vieux meubles, les repeignent et les rembourrent pour leur donner un nouveau souffle avant de les revendre. Cela donne aux compagnons Emmaüs la possibilité d’acquérir de nouvelles compétences ou d’utiliser leur talent créatif existant pour remettre des objets en service.

Quelle est votre approche de la formation et du développement des compagnons ?

Pendant leur séjour dans une communauté Emmaüs, les compagnons sont encouragés à entreprendre des activités de formation et de bien-être pour leur développement personnel et professionnel. Emmaüs accompagne ses compagnons dans la poursuite de leurs objectifs ; de manière holistique et financière. L’année dernière, les compagnons Emmaüs ont été soutenus pour compléter 1850 formations. Les types d’activités peuvent inclure des cours pratiques, des certifications, des formations, des activités sportives, des visites dans d’autres communautés Emmaüs au Royaume-Uni et à l’étranger, etc.

Ces opportunités peuvent aider les compagnons à développer de nouvelles compétences (ou à s’appuyer sur celles existantes), à renforcer leur confiance, à améliorer leur santé et leur bien-être mental et / ou physique et à améliorer leur employabilité. Les réalisations récentes incluent des compagnons apprenant à conduire, obtenant une qualification en tapisserie d’ameublement, des qualifications en fabrication de meubles, une licence de chariot élévateur, des visites dans des communautés à l’étranger, un cours de boulangerie, des leçons d’équitation et bien d’autres.

Actualités Entretiens Royaume-Uni

© Emmaüs Colchester

Le coronavirus renforce les arguments en faveur de nouvelles lois européennes sur le textile

65 groupes de la société civile publient une vision commune.

Alors que la Commission européenne s’apprête à élaborer une nouvelle « stratégie globale pour le textile » dans les mois à venir, Emmaüs Europe et un groupe de 65 organisations de la société civile présentent leur vision détaillée pour l’avenir du secteur (textile, habillement, cuir et chaussures – THCC).

Nous appelons la Commission européenne, les députés européens et les gouvernements de l’UE à soutenir une stratégie ambitieuse qui relancera une refonte mondiale du modèle économique de l’industrie textile pour le monde post-coronavirus.

Ce secteur a longtemps été caractérisé par les violations du droit du travail et des droits humains ainsi que par l’immense pression qu’il exerce sur notre environnement et notre climat.

L’Union européenne s’est engagée à créer une stratégie pour le secteur textile qui vise à résoudre les problèmes de durabilité environnementale et de droits de l’homme.

Notre proposition de stratégie textile globale de l’UE contient des recommandations dans cet objectif, notamment :

  • D’une législation européenne sur la diligence raisonnable des entreprises (devoir de vigilance) en matière de droits humains et de protection de l’environnement. Celle-ci couvrirait l’ensemble des secteurs économiques mais comprendrait des exigences spécifiques pour le secteur textile. Une telle législation obligerait les entreprises à assumer leurs responsabilités, pour leurs propres activités mais aussi pour l’ensemble de leur chaîne d’approvisionnement.
  • De règles environnementales plus strictes, couvrant la manière dont les produits textiles vendus dans l’UE sont conçus et produits, et la responsabilité juridique et financière des producteurs en matière de déchets et une politique de réemploi et de recyclage impliquant les acteurs de l’économie sociale et solidaire.
  • D’obligations légales en matière de pratiques commerciales afin que les marques et les détaillants cessent leurs pratiques d’achat déloyales. Comme l’illustre de manière dramatique la crise du COVID-19, les marques peuvent impunément annuler leurs commandes à la dernière minute sans honorer les paiements, laissant les travailleurs sans salaire et un amas de produits invendables.
  • De réformes en matière de gouvernance et une meilleure application de la loi dans les pays producteurs, afin de s’attaquer à la racine des problèmes de durabilité au sein des chaînes de valeur textile.
  • De contraintes plus strictes en termes de politique commerciale, afin d’utiliser le pouvoir de marché de l’UE pour favoriser les pratiques de production durable dans le secteur textile.
Actualités Économie circulaire et solidaire / Écologie Union européenne

Covid-19 : mettons à l’abris les exilés au lieu de les enfermer aux frontières

Emmaüs Europe et les autres membres du réseau Migreurop demandent la fermeture des hotspots grecs.

Dans un communiqué du 2 avril, les membres de Migreurop dénoncent les conditions inhumaines dans lesquelles sont détenus les exilés dans les « camps de tri » européens sur les îles grecques.

Un film animé a été réalisé pour expliquer les mécanismes à l’œuvre dans la politique européenne des hotspots, dénoncer leur inhumanité et demander leur arrêt.

Actualités Défense des droits humains / Migrations Union européenne

Documents à consulter

Interpellation du Conseil européen pour la protection des plus vulnérables face au Covid-19

Emmaüs Europe et les autres membres d’EAPN (Réseau Européen de lutte contre la pauvreté) appellent les dirigeants européens à mettre clairement l’accent sur la protection des personnes les plus vulnérables face au Covid-19 dans une lettre au Conseil européen du 26 mars 2020.

Les membres d’EAPN ont identifié les groupes les plus à risque pendant cette crise (les personnes confrontées à la pauvreté dans les emplois précaires et à bas salaires et les chômeurs, en particulier les ménages avec enfants, les personnes âgées, les malades, les personnes handicapées, les sans-abri et les migrants) et les impacts socio-économiques évidents auxquels ils seront confrontés – perte de revenus sévère, isolement social accru et pour les sans-abri, exposition accrue au virus en raison d’un manque d’espace pour pratiquer la distanciation sociale, et opérations fournissant de la nourriture et du soutien à d’autres groupes vulnérables ayant été contraint de fermer dans toute l’Europe.

Nous proposons 4 priorités immédiates pour les États membres :

  1. Une action sanitaire urgente et coordonnée, axée sur la protection des plus vulnérables.
  2. Une action urgente pour protéger les travailleurs et assurer un revenu suffisant pour tous, y compris un soutien financier pour le maintien des emplois actuels, un revenu garanti, une augmentation du soutien minimum pour faire face à des coûts supplémentaires, une aide au revenu garantie pour aider les travailleurs indépendants ou en statuts particuliers qui perdent des revenus en raison de la crise.
  3. Une action urgente pour protéger les personnes menacées de pauvreté, y compris la suspension des expulsions pour non-paiement des loyers ou hypothèques, la prise en charge du paiement des factures d’énergie et la poursuite de la gratuité des repas scolaires pour ceux qui en ont besoin.
  4. Une action visant à limiter l’impact social des mesures de confinement sur l’isolement social et la solitude, y compris le soutien d’urgence aux ONG sociales qui fournissent des services de soins et de soutien, et la mise en place d’une assistance téléphonique nationale pour le soutien social et psychologique afin de faire face à un risque accru de violences domestiques et bus, en particulier contre les femmes

Une sortie de crise vers une Europe sociale :

Nous demandons aussi d’envisager une sortie de crise différente de celle de 2008 où des millions avaient été investis pour renflouer les banques sans prendre en compte l’impact sur les plus pauvres. Nous savons que les pays qui ont un système de santé publique universel et une protection sociale solide seront les plus à même de répondre à cette crise.

Nous appelons donc à un Plan Marshall pour protéger les personnes en situation de pauvreté, renforcer les systèmes nationaux de santé publique et de protection sociale et soutenir l’économie pendant cette crise et construire une nouvelle Europe.

Le financement de ces initiatives doit reposer principalement sur les riches, réduisant l’inégalité entre le 1% et le 99%. C’est le moment d’augmenter la progressivité des systèmes fiscaux, de soutenir la proposition de l’UE sur l’impôt sur les sociétés, d’aller de l’avant avec une taxe sur les transactions financières de l’UE, de combler les lacunes des paradis fiscaux et de soutenir un impôt sur la fortune.

Actualités Lutte contre la misère / Solidarité Union européenne